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TEXTES SUR L'ART : Image numéro img830.
De la page numéro 381 à la page 404 (Fin).


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déchirement, le tiraillement bien je l’ai exprimé par cet objet qui s’entr’ouvre. Puis là, de tout ça qu’est-ce que
c’est qui naissait ? C’est sûr que ça vient d’une espérance et je vivais quelque chose dans notre congrégation
qui est tout-à-fait nouveau, il n’y a pas d’autre congrégation qui vit comme cela à l’heure actuelle. Nous autres
on fait tout un changement au point de vue des structures. On ne vit plus de la même façon. C’est plus une
provinciale qui gère un groupe ; ça s’appelle des présidentes de réseaux qui s’occupent d’un aspect par exemple
l’aspect pastoral, une autre l’aspect enseignement avec les enfants, une autre c’est l’aspect leadership et on
est regroupées comme ça puis là on ne tient plus compte des frontières.
Moi je me suis retrouvée présidente de réseau et je me suis occupée de personnes qui restaient en Afrique,
en Asie, aux États-Unis, en Haïti. Alors toute une autre expérience. Alors cette expérience là on l’a traduit
dans un mot ‘’Voici que je viens faire du neuf’’ et c’est ça le propre de l’Art Sacré que j’apprends avec Monique
c’est d’exprimer en image un message qui me disait beaucoup parce qu’on avait des réunions. Alors là j’ai dit à
Monique, j’ai dit je pourrais peut-être te montrer ce que j’avais justement fait à l’école de la foi c’est ce qu’on
appelle faire un pèlerinage dans la Bible, faire une visite guidée. Alors je suis partie de la phrase ‘’Voici que je
vais faire du neuf’’ Is 43,19 et c’est cette phrase-là qu’on peut dire qui devient comme illustrée.

R.
Ton déchirement que tu vivais, les tensions dans le fond que tu vivais dans les choses qui semblaient s’opposer,
et puis à partir de cela, l’espérance que tu pouvais en avoir qui sortirait, qui était une inconnue qu’il fallait
que tu définisses quasiment au fur et à mesure de ton dessin, qui prenait corps à chaque fois, je suppose que tu
traçais une ligne…j’imagine, je ne sais pas ? C’est comme ça que ça venait ?

L.
C’est comme ça que ça vient puis c’est toujours sous le regard du maître. Elle ne dit pas tu vas faire ça de
telle façon. Elle me laisse faire. Puis, moi…elle m’a donné…je trouvais, tu sais, bon. Si je regarde la partie
du bas, je trouvais que mon dessin je ne l’aimais pas, qu’il était trop gros. Là les journées avançaient. Moi
vois-tu, mon idée de perfection. Alors, je voulais toujours plutôt qu’est-ce que je veux traduire comme message ?
Qu’est-ce que je veux traduire ? Alors, j’ai remarqué qu’une journée par exemple j’ai retrouvé cela dans mes
notes, à un moment donné je pense qu’elle m’a dit quelque chose comme vois-tu, elle dit, pour la forme et la
couleur on sent le déchirement qui vaut à peu près un tiers de la feuille, mais pour rentrer dans l’image du
renouveau tu as les deux tiers de la feuille…Ah bon ! Bien cela ça m’aidait, hein…Il y a plus de renouveau,
moins de déchirement…donc elle disait, travaille vers le renouveau, arrête de penser à toujours travailler…
je voulais plus donner de relie parce que n’oublie pas

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qu’elle nous fait travailler juste avec trois couleurs, dans ça il y a juste de la gouache rouge, de la gouache
bleue, puis de la gouache jaune, donc les trois couleurs primaires. Alors là elle me fait faire les couleurs…alors,
c’est moi, qui faut qui travaille les couleurs. Puis on travaille sur un petit papier très, très simple… Alors vois-tu,
cette femme-là elle a cette foi qu’à partir de moyens très simples, à partir de personnes qui ont pas de grosse
initiation dans la peinture, ça peut être des débutants comme ses handicapés…puis elle va chercher en nous,
c’est ça qu’elle nous fait…on va chercher en nous quelque chose…Bon c’est ça, un jour elle m’a dit, vois-tu
on était rendu au 7 novembre, alors là ça faisait assez longtemps que je travaillais sur la petite boule en bas,
le déchirement, là elle m’a fait, elle m’a dit comme ça des choses. Alors…moi je m’inquiétais pour la technique…
Vois-tu, elle me disait des choses que la technique…dans une œuvre d’art, mais c’est plutôt la relation de l’artiste
avec son thème qu’il faut exploiter, mais plus à 80%. Alors là j’ai plutôt travaillé. Si tu remarques il y a un
petit bourgeon qui sort de ce déchirement là et sous l’action de Dieu qui dit ‘’Voici que je vais faire du neuf’’,
il s’épanouit. C’est ce que je voulais traduire…Tu comprends, à chaque fois je revenais puis je disais avec
mon œil qui veut du parfait, c’est pas assez…je veux que ça s’épanouisse davantage…puis tu sais…mais
c’est plutôt moi, mon message…C’est ça en fin de compte arriver à exprimer l’Art Sacré.

R.
C’est ça, mais tu n’as pas choisi la moins parfaite des fleurs quand même, une rose !

L.
C’est devenu comme ça.

R.
C’est une rose ?

L.
Ah ! j’ai pas nommé. C’est l’épanouissement…

R.
Ah bon ! Moi, je le vois comme une rose avec beaucoup de pétales.

L.
C’est ça, l’épanouissement…Alors vois-tu, là après ça elle disait que pour moi être saisie de Dieu c’était
la lumière. J’avais pas grand, tu sais là…alors elle me dit ça peut être autre chose que la lumière qui montre
l’action de Dieu, ça peut être une main…c’est peut-être pas nécessaire que ce soit toute la personne
de Dieu qui soit là, imagine ma

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main que j’ai essayé de faire…moi je voulais la mettre dans la lumière mais elle dit tu peux peut-être…
Vois-tu ? Des petites suggestions. Mais je travaille longtemps avant qu’elle me…Mais là j’avais de la
misère avec ma main c’est épouvantable. Bien elle me dit quand elle a vu cela, elle m’a dit peut-être si tu
traçais ta main, tu la découpes et là tu la places comme tu veux et où tu veux…

R.
Dans le fond elle ne te suggère pas comment faire la main, mais peut-être une manière de régler ton problème…

L.
Parce qu’il fallait bien que j’avance…alors, il reste à mettre cette lumière là. Tu vois l’attouchement de
Dieu qui vient faire du neuf alors là j’ai travaillé ça comme ça.

R.
Puis la main c’est toi…c’est toi qui te mets au monde finalement.

L.
Non, c’est l’attouchement de Dieu ! Ah oui ! c’est vrai, parce que nous autres : il faut s’aider.
Il faut vraiment s’aider.

R.
Tu sais dans le fond il y a une combinaison des deux, de l’action de Dieu par inspiration qui vient de
l’intérieur puis tu as quand même la main qui est réelle qui est concrète qui vient…

L.
C’est pour ça qu’on sent que c’est un papier très, très simple, cheap qu’on pourrait dire. Alors elle nous invite.
Ça j’ai trouvé ça difficile par exemple parce que moi j’aime comme l’aquarelle très, tu sais là les couleurs
comme elles sont. Puis elle dit si tu les vernis ça va éviter d’abord la moisissure puis ensuite ça donne du relief.
Alors là j’ai fait confiance. Elle me l’a fait repasser à part de ça. à l’envers ! J’avais peur ! Repasser ce papier là !

***

R.
Ne pas diluer tes couleurs

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L.
Non. Puis là je lui faisais vraiment confiance quand elle me demandait de faire ces choses-là…parce
que le vernis lui…C’est…Je ne sais pas, on est partie de quelle question ? Je ne me rappelle plus là.

R.
Ah bien, tout simplement comment Monique t’avait amenée là à l’Art Sacré dans le fond parce que on est partie…

L.
Ah oui ! La retraite.

R.
Bien la retraite, Monique m’a dit à un moment donné elle dit j’ai dit quelque chose et Louise, une dame très
particulière, elle n’est plus là, elle avait une idée dans la tête, ça fait que là elle s’est enfermée je ne sais pas
combien de jours, deux ou trois jours dans se chambre puis elle creusait…Ça fait que je ne sais pas si c’était
à l’intérieur d’une retraite ou si c’était tout simplement parce que là tu étais…tu cherchais…

L.
Oui, il y a quelque chose que je cherchais. Je peux te le traduire dans le sens que, comme je te disais…
Vois-tu ça a duré tout le temps d’avant les Fêtes et puis à un moment donné l’intervention de Monique
était très discrète. Puis elle parle beaucoup, beaucoup de choses tout le temps qu’on peint qui est pas
nécessairement de l’Art Sacré. Alors moi je venais pour suivre un cours en Art Sacré, alors je voulais
en connaître davantage sur l’Art Sacré. C’est sur qu’elle m’avait donné ça d’épais à lire, mais je me
dis quand on a le professeur avec nous autres il y a des choses qui sortent du professeur qui sont de l’inédit.
Alors, j’ai plutôt réfléchi qu’est-ce que cette personne-là pouvait me traduire ? Qu’est-ce qui était d’elle-même ?
Alors qu’elle parlait si peu de l’Art Sacré pendant tous les cours. Elle disait qu’elle aimait venir parce que moi
j’étais là et qu’on causait de toutes sortes de choses qu’elle aimait m’entendre causer puis bien des fois elle
aimait faire silence puis elle regardait aller mon pinceau. Puis, pour elle, elle tombait comme dans une espèce
de contemplation : elle ne parlait plus. Alors parce que j’ai remarqué de plus ou moins de personnes qui sont
allées à ses cours mais elles ont laissé. Je me dis des fois d’abord de Monique qui parle beaucoup, mais qui ne
parle pas d’Art Sacré peut-être que pour certaines personnes qui ne dit pas que tu devrais faire cela comme
ceci comme cela, mais je comprends le maître qui ne fait qu’accompagner. Ça un maître spirituel, c’est vrai,
ça ne fait qu’accompagner…

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R.
Alors elle en temps que maître peintre si on pourrait dire elle accompagne son élève dans son expression personnelle.

L.
Oui…oui…

R.
Puis c’est peut-être cela qui n’aurait pas été saisi par les autres qui auraient abandonné, penses-tu ?

L.
Puis surtout le premier cours elle avait parler beaucoup qu’elle nous avait demandé de faire des choses alors
peut-être que je me dis un premier regard, une première approche de Monique, peut-être que quand on se fait
une opinion rapide, bien peut-être qu’il y en a qui ont laissé…alors moi…après trois mois là plutôt je me
disais qu’il y a quelque chose de Monique qui est en elle et qui est à s’exprimer. Alors, c’est pour cela que ma
réflexion ça été d’abord pour moi. Qui est Monique pour moi ? Et après cela je vais lui traduire, qu’est-ce que
c’est là. Alors, c’est ça je lui ai écrit puis je lui ai lu. C’est ça je suppose de ce que je lui ai lu c’est un peu ce
qui lui reste aujourd’hui. Comme quoi que quand on parle à quelqu’un il y a toujours comme tu disais tantôt
l’écoute, mais on décode hein on prend pour soi, mais on décode après on le dit autrement. Alors c’est sûr
qu’elle te l’a traduit un peu autrement hein.

R.
Oui

L.
Après certains mois…puis elle le traduit avec son admiration là, ouf, faut rester avec bien de la simplicité
avec moi, ce n’est pas rien de…

***

R.
Oui c’est ça et puis non pas la juger à partir de certains critères tu sais? C’est un petit peu comme l’artiste.
Il y en a qui vont travailler avec de l’aquarelle, d’autres vont utiliser la spatule, puis d’autres vont avoir
des modes d’expression…puis l’approche disons, l’idée…Monique est-ce qu’elle t’a déjà parlé de son idée
de fondation d’Art Sacré ou elle t’en a parlé juste un petit peu…comme ça. Je pense que c’est une idée
qui est toute neuve pour elle…j’ai l’impression que c’est ce qui vient d’y sortir là…sa

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dernière intuition. J’ai l’impression que c’est un peu sa dernière intuition et puis le fait qu’elle donne des
cours à des déficients intellectuels ou handicapés physiques…d’après toi est-ce que il y a une recherche de
quelque chose dans…avec cette clientèle là ou bien non…

L.
Bien moi comme je regarde Monique puis je sais que Monique croit, coûte que coûte, à l’Art Sacré comme
étant un art qui traduit un message puis le message vient de soi. Puis elle, vois-tu, faut voir même dans des
gens faibles, limités qu’il y a des richesses autres que ce qu’on voit. C’est un message ça.

R.
Ce serait tout ça dans le fond qu’elle voudrait démontrer en s’adressant à cette clientèle là.

L.
Elle s’adresse à cette clientèle là puis moi je suis allée en voir une exposition. Puis c’est vrai, c’est vrai de…
croire qu’à travers ces peintures que des fois on va appeler naïves, il y a vraiment quelqu’un qui veut exprimer
quelque chose…Voir la personne en arrière là. Puis c’est pour moi là c’est déjà un message de voir Monique
qui prend du temps pour aller vers ces personnes-là puis prendre du temps avec ces personnes-là…
Qu’est-ce qu’on fait ? On les rejette.

R.
Habituellement…oui

L.
C’est vrai !

R.
Le premier réflexe c’est qu’on n’est pas à l’aise.

L.
On n’est pas à l’aise…

R.
C’est ça…

Page 387

L.
Et puis…peut-être que trop vite on dit bon bien ils sont finis ! Vois-tu il y a des personnes qui ont
commencé à peindre à 67 ans, à 75 ans…puis ils se sont découverts des talents. Pourquoi qu’au cœur
de ces gens –là comme il y en a un je pense qu’on lui a fait apprendre à peindre avec sa bouche…
un autre qui peint avec ses pieds. Alors les appels au dépassement hein, à des défis qui nous
permettent de croire en nous là, oui.

R.
Ce serait dans le fond son but peut-être…qui la pousse

L.
En tout cas, cela traduit ce qui est en elle, de cette foi en la personne. Pour moi, oui moi en tout cas
c’est le jour où je lui ai traduit des choses c’était un peu ça hein ? Elle croit en ce qu’elle croit puis elle
continue à y croire coûte que coûte contre vents et marées hein ? Même un peu comme une absurdité hein
c’est presque absurde de croire qu’il va sortir quelque chose, mais quand on regarde ça non pas avec des
yeux comme on dit il faut que la maison soit parfaite, il faut qu’elle soit droite, mais quelqu’un qui veut
exprimer quelque chose… qui est enfermé ; donc, il a fait une maison pas de fenêtre, pas de porte.
Ce n’est pas parce qu’il ne sait pas, mais lui, il est enfermé puis il le traduit dans une maison

R.
Ah oui…il y a toujours un sens…d’amener finalement la personne qui fait ce dessin-là à dire, mais
ça veut dire quoi ça ? Cela me rappelle que j’ai été juste une journée dans son atelier avec ses déficients
et puis, je me rappelle que oui…à chaque fois qu’elle en regardait un, bon bien ça te dit quoi ça, qu’est-ce
que tu veux dire par là ou bon bien penses-tu que…je ne sais pas…de quelle manière que tu voudrais
faire ton affaire, tu sais, elle retourne tout le temps la personne à elle-même…tu sais…pour essayer
de découvrir, mais comme tu dis ça demande une foi qui dépasse les montagnes parce que il y a des fois là…
je te dis que…

L.
Il y a des barbeaux, ils renversent les pots…

R.
Trouver les sens, là ce n’est pas évident…C’est surtout pas évident. Ah oui, il y a des fois là, ils vont
mettre un titre puis le titre…je ne sais pas là moi je ne vois pas le rapport…tu sais…mais il y en a un
pour eux autres. Il y en avait un qui à un moment donné il avait une carte puis il disait, probablement
un trisomique, en tout cas il avait de la misère à parler, puis il disait que c’est une carte pour ma petite
sœur qui est morte

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ou mon père qui est mort en tout cas c’est quelqu’un de proche qui était décédé et il avait fait une carte
mais il aurait fallu le savoir hein…moi je ne le savais pas…mais elle a réussi à y faire dire que
c’était ça tu sais ?

L.
Oui… dans le fond même si le dessin n’est pas beau elle laisse exprimer quelque chose hein ? Dieu sait
que c’est important que l’on puisse exprimer. Il y a bien des façons d’exprimer. Il y en a que c’est dans
la musique, d’autres c’est dans le chant, d’autres c’est dans l’écriture, d’autres c’est dans la peinture,
d’autres c’est dans la sculpture. Il y a bien des façons d’exprimer.

R.
As-tu regardé plusieurs de ses œuvres ?

L.
A Monique ?

R.
Oui !

L.
Bien oui elle a fait une exposition l’année dernière puis je suis allée aussi, une rétrospective là, oui,
puis moi à ce moment-là c’est sûr que là tu dis on perce le mystère d’une personne parce qu’elle aussi
par ses toiles elle exprimait d’elle. Tu vois ? Alors, j’allais là tu sais comme avec grand respect de
quelqu’un qui se dévoile là hein… J’ai aimé ça ; j’ai aimé ça, oui. Moi quand j’arrive devant un peintre
j’aime ça me dépouiller de tout ce que je pense déjà là puis je me dis là il y a une personne qui dit quelque
chose elle a sa façon à elle. Alors, je ne peux pas dire j’aime ou j’aime pas. Je ne peux pas dire ça, je
dis c’est cette personne-là puis je regarde ça puis je trouve qu’il y a beaucoup de talents pour exprimer
à sa façon à elle.***

R.
Dans ton rouleau qu’est-ce que ça dit ?

***

L.
Avant de te l’afficher, je veux retracer le psaume qui m’a inspirée. Vois-tu je l’ai ici. Moi c’était le
goût d’avoir une cithare un jour…C’est à peu près ceci : ‘’Mon cœur est prêt, ô

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Dieu. Mon cœur est prêt ; je veux chanter, je veux jouer pour toi ! Éveille-toi, ma gloire ;
éveille-toi, harpe, cithare, que j’éveille l’aurore !’’ Alors là aussi j’ai fait une recherche, hein.
Elle m’a fait travailler ça bon c’est la louange, c’est mon cœur qui est prêt à te louer,
je l’ai exprimé après par les cordes.

R.
Ça c’est l’idée qui t’a…

L.
La harpe ! alors, j’ai commencé par exprimer la harpe. (on change de tableau)

***

R.
La brillance…

L.
Oui (il est installé) alors mon cœur est prêt situe la personne. Puis à force de le faire, vois-tu, il m’est
venu des choses. Exemple : l’aurore. J’ai voulu manifester l’aurore hein, la lumière et puis ça me
rappelle que David aimait beaucoup danser devant l’arche, hein. Traduire son admiration pour Dieu
c’est aller jusque dans le geste de danser devant l’arche.

R.
C’est ce quoi on voit en haut d’ailleurs

L.

Oui… et puis l’aurore…tout à coup là une journée je trouvais que je ne manifestais pas assez que
c’était ‘’dès l’aurore je m’éveille’’, Éveille ta gloire alors j’ai pensé que le symbole ce serait le coq du matin…

R.
Que tu as mis dans le cœur…

L.
Qui est au cœur de moi…la personne…je n’ai pas voulu mettre de traits, rien parce que je me disais
c’était la personne, l’être humain, la personne. Puis vois-tu la danse, la louange dans les champs…
c’est ça la danse là s’exprime là. Ensuite le bleu qui est coupé

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avec l’aurore, la nuit. La nuit est en arrière de moi, la lumière est en avant de moi…et puis ma harpe…
c’est là qu’elle m’a montré comment faire mes cordes. On a mis une corde dans de la gouache, on a juste
fait péter la corde, la tirer là puis elle a juste tombée. Là on aurait voulu les corriger. Elle a dit non,
on les laisse comme elles sont. C’est ça… Vois-tu c’est juste comme pour signifier, signifier…faire penser à.

***

L.
Je ne faisais pas de l’Art Sacré encore là, c’était moi qui faisais ces choses-là.

R.
C’était avant de commencer avec Monique ?

L.
Oui, oui… Vois-tu ça c’est le jour de ma retraite du potier, ça s’appelle la retraite du potier.
Ça c’est juillet 1992 que j’ai fait ça bon. C’est vide ! Sensation que j’ai quand je me mets en état
d’attente…en état d’attente ce matin 17 juillet 1992. Alors comment ça s’est exprimé. C’est comme ça…
(elle me montre un dessin) l’attente, les mains disposées à recevoir…bon en tous les cas, des choses
comme ça, là mais elle nous les faits écrire…c’est peut-être comme ça que je l’ai écrit par rapport à
la deuxième toile…vois-tu… j’en ai encore des choses ici là…sur…regarde, vois-tu j’avais travaillé,
j’essayais de traduire l’envahissement, tu vois là, le matin, l’aurore, j’avais travaillé un peu comme ça.
Ces dessins traduisent ma difficulté à traduire ce que je veux exprimer…mes regards, contemplation…
des reproductions d’artistes s’émerveillent de leur faciliter à traduire émotions, valeurs…et ça traduit
la liberté de la créativité. Alors moi j’avais écrit ça ce passé-là. Là je dis ça à Monique quand j’arrive
et là c’est là qu’elle me corrige et qu’elle me dit sa pensée à elle…parce que quand j’avais vu son exposition
elle avait dit : Pense pas de me copier là… mais je n’avais pas le goût de la copier, mais je suis toujours
insatisfaite parce que pour moi je ne traduis pas dans ma peinture ce que je veux exprimer.

R.
O. K. tu étais encore comme accrochée à quelque chose de stéréotypé on pourrait dire…

L.
C’est ça l’éducation. Tu vois comme ma cithare je l’ai fait un peu comme ça là ici un peu tu sais avant
comment je voyais ça…je voulais mettre mes étoiles dans la nuit, mais elle me dit, en Art Sacré,
faut briser les symboles qui sont trop courants, qui deviennent

Page 391

commercial. Alors, elle a un pas en avant de nous Monique, mais c’est ça qui n’est pas encore assez reconnu.
Elle fait vraiment école à part, ça c’est des artistes, un moment donné ils font école à part.

R.
Bien les pionniers, c’est toujours ça.

L.
Ah oui, c’est vraiment ça.***

***

R.
Ah oui… j’aime beaucoup les deux que tu m’as montrées…parce qu’on va travailler aussi deux aspects
de l’Art Sacré. L’Art Sacré qu’on appelle séculier puis l’Art Sacré religieux. Alors là actuellement,
je ne sais pas, c’est peut-être ma perception, mais ta source d’inspiration est religieuse.

L.
Oui…oui j’avais compris ça, oui

R.
Ta source d’inspiration est religieuse, ça irait peut-être, je ne le sais pas…

L.
Peut-être une dimension spirituelle.

R.
Oui c’est ça une dimension spirituelle qui est là.

L.
C’est ça…c’est ça…Puis c’est ça mon apprentissage parce que si tu remarques avant. Ce n’est pas pour
rien je voulais vous montrer les autres toiles avant. Les autres sources d’inspiration c’était mon regard
moi quand je regarde déjà je compose une toile. Que de fois je m’en vais en voiture et je me dis Ah ça serait
beau ! Déjà je compose une toile dans ce que je vois. Puis je voudrais déjà tout le traduire parce que
j’aime les couleurs et j’aime aussi la nature…J’aime beaucoup la nature. Alors, c’est ça la source
d’inspiration. Puis là ce n’est pas ma source d’inspiration. Ma source d’inspiration n’est plus extérieure,
ma source d’inspiration dans l’Art Sacré elle m’appelle à faire foi à ce

Page 392

que moi je vis. Puis là il faut que moi il faut que je tente d’exprimer ça puis il faut que ça devienne un
message comme elle me dit. Là c’est moi qui a le message avec ça, mais est-ce que pour d’autres ça
devient un message ? Ça, c’est quelque chose.

R.
C’est un peu comme si tu étais porteuse de ce message-là à travers ce véhicule là.

L.
Mais tu sais j’ai l’impression quand je comprends Monique là que dans l’Art Sacré il y a aussi le message,
le langage devient…c’est pas tant…en tout cas, je ne sais pas comment te dire ça…l’émotion devrait
se traduire là…il devrait susciter l’émotion…C’est quelque chose tu sais

R.
Y a rien de la tête là-dedans ça vient du cœur…

L.
Oui…supposément…

***** (L’entrevue continue quelques pages, mais tout ce qui a rapport à Monique a été transcrit
dans ce que vous avez lu.)

***** (Fin du dossier : ‘’Enseignement, ‘’Art Sacré’’’’.)

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(Bio., page : 2723) (1998 – 99)

***** (Quelques extraits d’un bloc-notes.)

La Peinture

Je ne vivrais que
pour elle,
elle m’enveloppe
me console
et me protège.
---------

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(style Chagall)

en m’éveillant
j’ai vu mon
chat qui avait
un sourcil
et moi une auréole.
---------

J’aime Bob Dylan, car c’est
la victoire de la joie de vivre
sur le drame de l’existence.

Monique J. 1/ 1/99
----------

Tableau à faire

‘’Le Cantique de
Maximilien Kolbe’’

À la mémoire de mon professeur
d’histoire de l’art, avec
compassion et gratitude.


***** (Monique ‘’découvrit’’ St- Maximilien Kolbe dans ses cours de vie Mariale, elle fit immédiatement
le lien entre cet homme qui était mort dans les camps de concentration nazie et un professeur qu’elle connue
à l’école des Beaux- Arts de Montréal. Je laisse Monique vous expliquer comme elle me l’a relatée :
- En première année aux Beaux- Arts, nous avions un cours d’histoire de l’art et je profitais de ce cours
pour me reposer, somnoler un peux entre deux ateliers. Le professeur était d’un certain âge et parlait avec
un léger accent. Je me souviens lors du dernier cours au travers ma ‘’somnolence’’, je l’aie entendu dire
qu’il avait été incarcéré dans un camp de concentration lors de la Deuxième Guerre. Il le mentionnait
discrètement dans le cadre de nous informer du chemin parcouru par certaine œuvre au travers des
bouleversements sociaux et que lui avait été forcé ‘’d’authentifier’’, dans le camp même, certaines
œuvres que les Allemands avaient volées. Je sortie spontanément de ma somnolence, les pensées se
bousculaient dans ma tête ; cet homme a vécu les camps et moi j’ai dormie toute

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l’année pendant ses cours ! ! ! Son regard sur l’Art n’est pas uniquement livresque, j’ai ratée un témoignage
authentique d’une grande valeur. J’étais bouleversée, après le cours je suis descendu le voir et je me suis
excusée de ma conduite. Je lui aie demandée si je pouvais lui poser quelques questions sur son expérience
dans les camps. Il m’a souri et m’a dit que non, qu’il en parlait que très rarement et qu’il l’avait fait dans
le cours pour souligner un fait. Je me suis excusée de nouveau, j’étais très émue et je l’aie serrée dans mes
bras puis je suis partie. Malheureusement, l’année suivante il n’était plus là. Alors quand j’ai découvert
Maximilien Kolbe, j’ai décidée de peindre une toile de lui à la mémoire de ce professeur.’’
Monique me décrit brièvement ce qu’elle avait l’intention de peindre. Ce devait être un camaïeu…
Elle avait choisi de le représenter dans l’environnement des camps de la mort nazie; des bâtiments en
fond de plan, une silhouette, un avant-bras immatriculé, tout ceci empreint de subtilités et de suggestifs…
rien de grotesque.

***** (Monique entreprit une toile sur le thème Biblique ‘’Des trois tentes’’ à l’été 2004 qui
demeure inachevée. Elle m’avait aussi demandé, ce même été, de lui préparer une toile prévue pour
le thème ci haut mentionné.)

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(Bio., page : 2738) (2004)

***** (Commentaire tiré d’un carnet.)

‘’…1

Quand je suis ren-
trée d’Amérique du
Sud, ils ont tous dit :
(reproche) qu’ils ne s’im-
pliqueraient pas dans
l’art ‘’naïf’’ (puisque
mon art sacré est figura-
tif.
Quand j’ai rapporté le
‘’fait’’ en France, tout
le monde se tapait les
cuisses en parlant du Qué-
bec : ‘’Donc, Raphaël était un

Page 395

peintre naïf ! ! !’’

2

Ce n’est pas moi
qui décide ce que les
directeurs de galeries
disent (aux critiques
d’art). S’ils veulent
de moi O. K., je serais
là ; mais s’ils ne m’accep-
tent pas, qu’y puis-je ! ! !’’

----------------------------------------

(Bio., page : 2739) (2004)

***** (Notes dans un autre carnet : pensées, réflexions.)

Un aspect de la connaissance est l’appréhension.
Lorsque l’on peint, on appréhende avec réalité.
----------

Quitte du dépassement de soi, dès le début, etc., etc., etc.
Donc une peinture axée sur l’Essentiel.
Peu à peu (plus tard), je m’aperçus de la nature des thèmes exploités. Ils me firent réfléchir,
puis discerner les fondements de la pensée humaine. (1)
(1) La pensée universelle, consciemment ou inconsciemment. Mon cheminement vers la conscience,
lui-même m’a indiqué les paramètres du cheminement universel.

En comparant mes thèmes et ceux de différentes cultures, je pris conscience des écarts et
des rapprochements à faire (ex. : Afrique – violence et sexualité, Europe du Nord-est – violence
MAIS sexualité camouflée.)
Aujourd’hui : décrire la ‘’silhouette’’ d’un profil du sacré.

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(Bio., page : 2745) (2004 – 05)

***** (DOSSIER : Entrevue avec Monique sur l’Art Sacré. Le texte suivant est une
entrevue que je préparais avec Monique au courant de l’automne (novembre, décembre 2004).

Introduction :

Tout le monde, dit ‘’civilisé’’, s’accorde à dire qu’on a désacralisé la vie. Voilà que vous, Monique Jarry,
vous nous arrivez avec une vision SACRALISÉE de la vie ! ! ! Vous nous amenez un nouveau concept ;
en plus du Sacré ‘’religieux’’ que nous connaissons déjà, entre autres en Art Sacré ; comme on le sait,
vous êtes vous-même une artiste en Art Sacré. Voici que vous nous arrivez avec le nouveau concept
en théologie de la Beauté en art : Le Sacré séculier.


Q – Quel a été votre cheminement pour en venir à l’Art Sacré ?

M. J. - Tout d’abord je dois dire que je suis de culture acadienne par
ma mère. Ma mère est originaire de l’Île de Lamèque. Cette
culture acadienne est mystique et très ouverte aux arts. A
Montréal je me sentais étrangère à la culture environnante.
Dans ce contexte, au début de ma carrière, ma peinture était
d’abord une critique sociale, une dénonciation de
l’inconscience contemporaine. Un moment donné j’en ai eu assez
de m’angoisser et j’ai commencé à vouloir exprimer la Beauté,
la liberté orientée vers l’Art Sacré. Ce fut le début d’une
recherche d’expression de l’Absolu. Il m’était plus facile
alors de m’identifier à la culture chrétienne en tant
qu’acadienne que de m’identifier à la culture québécoise. Et
c’est par le biais de l’Art Sacré que je suis sortie de mon
isolement culturel.
Quand j’abordais l’Art Sacré il y a une trentaine d’années de façon consciente,
à cette époque-là les religions Abrahamique ça me sonnait une cloche, ça
répondait à quelque chose pour moi, Moïse et le monothéisme aussi bien sûr.
J’ai l’impression qu’en étant réaliste en toute simplicité, la première chose

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était qu’il n’y avait qu’un seul Dieu et ça m’apparaissait une évidence.
Comme je disais à l’époque j’en avais assez de m’angoisser et j’ai commencé
à vouloir exprimer la Beauté, la Liberté orientée vers l’Art Sacré. Ce fut le
début d’une recherche d’expression de l’Absolu. Doit-on croire que la
connaissance est une recherche de l’Absolu ? Ça m’apparaît plausible.

Q - Le Sacré mène à la connaissance ?

M. J. - Aujourd’hui je crois que le jour qui vient, que ce seul Dieu, est assez évident.
Cependant, je crois que ce n’est pas la première question à se poser. Je crois
qu’il faut d’abord se faire une vision claire de ce qu’est la connaissance et en suite
quand on est chrétienne comme moi, on ce demande tout de suite qu’est-ce que
la théologie et alors ce qui nous semblaient évident comme la Ste-Trinité par
exemple devient quelque chose de théorique. Oui, d’autres avant moi ont élaborés
des théories sur Dieu et ont élaboré cette théorie de la Trinité. Bien sûr ils diront
que c’est écrit dans la Bible.
Alors évidemment pour revenir à la connaissance, je suis frappée par le fait
qu’il y est trois grandes voient de la connaissance, le Bon : le bien ou le mal, le
Vrai : le vrai ou le non-vrai, pour être scientifique (rire) et enfin : le Beau. Mais
je suis frappée par une chose subitement, je les considère comme des vois de
la connaissance, mais je n’est pas encore élaborée ce qu’était la connaissance.
Il est certain que je sois encore d’accord avec une opinion d’époque dans
laquelle se disait que la peinture était une approche du beau. Il fallait à cette
époque, pour moi, que l’Art Sacré soit une question d’inspiration, de la
Présence, de la recherche de l’Absolu. Je suis encore d’accord avec ces énoncés.
Une tradition de notre spiritualité révèle que l’artiste cherche à saisir la Beauté
qui est un attribut de Dieu…c’est possible.
En fait, c’est plus que possible. Il est évident que la Beauté, le Bien et le Vrai
sont des attributs de Dieu et ce sont ces attributs-là que la connaissance essaie
d’aborder et je dirais le moins tenté de vampiriser. (Rire) Oui, je dirais aussi
que la peinture est une approche empirique, c’est évident, surtout quand on la
compare à la théologie qui a fondé les bases de notre religion chrétienne à
venir jusqu’à maintenant. L’approche de la Beauté de la peinture par exemple,
est certainement beaucoup plus empirique. On a souvent l’impression que ce qui
est empirique est moins clair, moins solide que ce qu’apportent des théoriciens.
Pourtant on dirait lorsqu’on peint et que l’on a cette approche empirique à la
Beauté, pour moi, on fait quelque chose, on fait quelque chose de concret, alors
que lorsque l’on fait de la théorie théologique, le quelque chose que l’on fait n’est
pas nécessairement concret.

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Oui, parler de l’empirisme de la peinture, quand j’étais adolescente, avec mon
groupe d’amis, on me surnommait à la foi ‘’le philosophe’’ mais à la foi aussi on
disait aussi ‘’Ti’Loup est empirique’’, et à ce moment-là, cela avait l’air que
j’étais moins clair que les autres théoriciens, moins réels, moins objective.
Pourtant, moi, je pensais que quand on a une approche à la Beauté en peinture
par exemple, au moins on fait quelque chose de concret et c’est très terre à terre
la peinture comparée à la théorie. Parce que la théorie, n’importe qui peut prendre
une feuille de papier puis s’asseoir, puis se mettre a faire diverses théories, ça
n’exige aucune connaissance particulière pour en revenir au mot connaissance,
aucune discipline bien précise, la théorie, c’est de la théorie. Enfin, c’est ce que
je voulais dire, je voulais parler de l’empirisme : dire le côté réel de l’empirisme.
Quand j’ai dit que j’étais d’accords avec cette tradition qui associe à la
connaissance, le Beau, le Bon, le Vrai comme étant des attributs de Dieu, je veux
aussi dire que le Dieu est non seulement Absolu mais Il Est perfection.
Enfin, le Sacré témoigne de la connaissance, évidemment l’interprétation des
œuvres demeure sujette à caution.

Q – Dans vos conférences, vous parlé du Beau, du Bien et du Vrai, comme étant
trois chemins pour rejoindre Dieu. Vous privilégiez le Beau : Pourquoi ?

M. J. – Il est vrai que : Le Beau est sans faute, c’est-à-dire que le Bon implique
le mal, le Vrai, le savoir versus l’ignorance. Nous pourrions dire que le Beau
implique le laid, mais cela est subjectif et donc sans faute. Personnellement,
je crois que le Beau est le plus court chemin pour rejoindre Dieu.

Q – Il est évident que l’on associe l’Art Sacré aux icônes. Est-ce que vous considérez
vos œuvres et ceux de vos élèves comme étant des icônes ?

M. J. - La définition du mot icône que donne le Petit Larousse est la suivante :
C’est un mot russe, venant du grec ‘’eilkonion’’ voulant dire, petite image.
Image sacrée, dans les Églises de rite chrétien oriental. Et le mot ‘’sacré’’
est défini comme ayant rapport au religieux, au divin. Caractère de ce qui
transcende l’humanité. Et je me souviens très bien qu’il rajoute entre
parenthèses : par opposition à profane. Je suis en désaccord avec cette dernière
énoncée.
L’Art Sacré c’est ce qui cherche à exprimer l’Absolu, le divin. Comme le dit
S. Esther, une artiste contemporaine : ‘’L’ artiste cherche à saisir la Beauté
qui est un attribut de Dieu.’’ Un paysage peut avoir quelque chose de
religieux ! De Dieu ! Dieu est dans cette recherche de la beauté de l’artiste ;

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il est dans l’inspiration, le dépassement de l’artiste… ‘’L’Art Sacré c’est peindre
avec le doigt de Dieu’’. L’art religieux fait partie de l’Art Sacré mais parfois il
peut être dévié et ne rien exprimer au niveau de l’intériorité, de la Présence, de la
recherche de l’Absolu.

Q – Une peinture religieuse n’est pas obligatoirement sacré ?

M. J. – Non ! Pas pour moi en tout cas. Ces vierges occidentales qu’ils dépeignent :
Idéale de beauté profane de la femme de telle ou telle époque. Ceci ne répond
pas à une quête ‘’d’Absolu’’ sans laquelle il n’y a pas de Sacré. Ou ces christs
pourrissants pour lesquels il est évident qu’il n’y a pas de résurrection…voici
au moins deux grands motifs d’empêchement.

Q – Et un art peut être sacré sans être religieux ?

M. J. – Bien entendu ! L’amour de la nature, l’amour de ses enfants, le droit au
travail, tout cela est sacré !

Q – Dans ce que vous énuméré comme étant des thèmes fondamentaux de l’Art
Sacré, vous nommé aussi la sexualité et la violence et d’autres thèmes que nous
n’avons pas tendance à associer à un Art Sacré religieux ou même séculier :
Pourquoi ?

M. J. – Je parle de la perte du sens du Sacré en occident…quand on parle de sexuel
je donne comme exemple les religions primitives. Les religions primitives font une
très grande place au sexuel, mais quand l’occident étudie cette question-là, elle
transforme le sexuel en sexualité et on perd complètement le petit avec l’eau du
bain et il y en plus de Sacré à ce moment-là.
Bref, ces thèmes sont très associés au Sacré dans certaines cultures. L’érotisme,
le sexuel et la violence en Afrique par exemple, oui, mais évidemment pas autant
dans la chrétienté.

Q – Est-ce qu’il y a des conditions précises pour qu’une œuvre soit considérée comme étant
Sacré ?

M. J. – C’est sûr que je peux donner un cours d’art profane, mais je suis rendue que je
ne la vois plus la différence entre un cours d’Art séculier et un cours d’Art
Sacré. Je voie la différence entre un cours d’Art Sacré religieux et non-religieux,

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mais je trouve que n’importe quelle peinture qui est authentique, qui est sincère
est sacré. Elle ne sera peut-être pas sur des thèmes religieux, mais elle va être sur
des thèmes qui sont sacrés, que notre société a justement désacralisés depuis
cinquante ans avec toutes ses révolutions.

Q – L’Art Sacré doit-il obligatoirement être figuratif ?

M. J. - Non. Récapitulons quelques-uns des grands thèmes de l’Art Sacré : l’immensité,
le vide, l’éblouissement devant la Beauté, la solitude, la violence, l’abondance, la
Présence, l’union, etc. Tous ces sujets peuvent sans doute être représentés par des
thèmes figuratifs, oui, mais aussi bien sûr, par des compositions abstraites.

Q – En plus d’avoir enseigné pendant six ans, l’Art Sacré au Centre de formation
diocésain qui est affilié à l’Université de Montréal. Vous avez enseigné la
peinture à des handicapés intellectuels pendant plusieurs années. L’Art Sacré
est-il à leur porter?

M. J. – Certains diraient ‘’comme tout le monde !’’ Moi je parlerais de ‘’l’essentiel’’ qui
prime toujours dans la vie de ses élèves. Rien n’est jamais banal pour un
handicapé intellectuel.

Q - Vous avez aussi enseigné à des handicapés physiques, il y en a même qui peignait
avec leur bouche ou avec leur pied. En plus, vous avez enseigné à des personnes
âgées en perte d’autonomie, soit physiques et/ou mentales. Vous avez observé des
différences dans ce qu’ils considèrent comme étant Sacré ?

M. J. – Oui…mes élèves sont souvent considérés comme marginaux, en effet. Mais
d’un groupe à l’autre, de marginaux en marginaux, représentent une portion
importante dans nos sociétés ! Arrêtons-nous un instant : le droit au travail par
exemple est Sacré. Regardons un instant ce que représente ce droit pour ces
derniers et nous sentirons l’importance sacrée de ce droit pour eux par delà les
considérations courantes : par exemple, l’argent rattaché au travail. Vous voyez
comme cette incitation n’est pas l’essentiel de la motivation de chacun d’eux…
Je vais me résumer de la façon suivante : J’ai initiée à l’Art Sacré des handicapés
du Centre Hospitalier d’Youville, des handicapés intellectuels et d’autres
étudiants du Centre de formation diocésain. J’ai eu une centaine ou plus d’élèves
qui ont suivi l’une ou l’autre des sessions, mais il y en a une quinzaine, parmi eux,
qui continuent d’approfondir avec moi cette démarche. J’essaie de faire

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comprendre que l’Art Sacré c’est une démarche de réalité, d’affirmation
d’intériorité. C’est en quelque sorte aller à la recherche de son identité chrétienne,
c’est se choisir.
Ce travail de création exige un engagement à fond, surtout pour les handicapés
physiques. C’est incroyable combien cela peut les structurer, les rattacher à eux-
mêmes dans la réalité. Il y en a qui sont sorti d’épisodes de confusion par les
ateliers d’art. Pour moi, l’Art Sacré c’est un chemin de recherche de Dieu, de la
connaissance. C’est aussi une théologie de l’image. Ça peut aider à unifier son
identité personnelle, culturelle et spirituelle. Au niveau de l’évangélisation,
comme on dit qu’une image vaut mille mots, une peinture d’Art Sacré peut
être un catéchisme populaire. Prenons un exemple. Des personnes ne voudront
peut-être pas écouter une homélie sur la Trinité, mais écouteront volontiers les
explications d’une peinture exprimant ce thème ! Devant une image, les gens
réagissent plus spontanément, c’est moins insécurisant que de jongler avec des
mots pour faire de la théorie. Tout cela pour dire combien, particulièrement des
intervenants en pastorale, auraient avantage à se donner une formation en
Art Sacré. Et en termes généraux, nous devons tous retrouver le sens de ce qui
est Sacré dans nos sociétés, que ce soit dans l’Art Sacré religieux et encore
davantage dans l’Art Sacré séculier. Si vous permettez, j’ajouterais ceci comme
dernier commentaire à se sujet : J’ai aussi été invité à l’occasion, a différent
endroits dans la province pour donner des cours d’Art Sacré en intensif, c’est-
à-dire quatre ou cinq jours de suite.
J’ai trouvée l’expérience tellement enrichissante pour la communication que nous
avons eue ensemble, que je me dis que même à St-Jérôme, même si l’on pouvait ce
voir régulièrement, on aurait dû faire des périodes intensives parce que ce n’est
pas pareil. L’intimité, la communication que nous avons eue entre nous, le
partage, c’est bien plus que juste trois heures par semaine. Parce que trois heures
par semaine vous savez : une semaine tu files, une semaine tu ne files pas, ça te
prend une heure et demie pour te mettre dedans, là, c’est déjà le temps de partir,
ce n’est pas la même chose.

Q – Comment fait-on pour se préparer à entreprendre une œuvre sacrée?

M. J. - Pour faire de l’Art Sacré religieux, il faut quand même prier. C’est plus
important que de se documenter dans cinquante-six mille livres de peinture
parce que premièrement, tu n’es pas là pour suivre un courant à la mode ou
un courant d’idée, tu es là pour passer un message de vérité qui te vient de
l’intérieur. Alors, l’inspiration de l’Esprit-Saint est fondamentale…l’idée, ça peut

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te prendre du temps à l’avoir, mais un coup que tu l’as, il faut que tu agisses
rapidement, que tu le fasses. Puis, quand je dis prier l’Esprit-Saint pour peindre,
pour être inspiré, je ne veux pas uniquement dire que la journée que tu veux
peindre ; le rentrer dans tes prières quotidiennes n’importe quand, tous les jours
même si tu ne peins pas pendant six mois, ça ne fait rien, le demander quand
même, c’est comme ça que ça va venir : pas seulement le jour que l’on peint.
Puis, on ne peut quand même pas faire n’importe quoi en Art Sacré, on ne peut
pas dire des niaiseries, faut que ce soit profond. C’est pour cela que je dis qu’il
faut demander l’inspiration. Votre référence c’est le regard intérieur,
l’intériorité : ‘’J’ai tu dis ce que j’avais à dire, ce qui m’a été inspiré de dire.’’ Le
regard intérieur, l’intériorité, sont des conditions essentielles que ce soit pour
faire de l’Art Sacré religieux ou pour faire de l’Art Sacré séculier. Être capable
de discerner ce qui est important, c’est très important ça, parce que l’on peut
avoir plusieurs inspirations et elles ne sont pas tous aussi importantes les unes
que les autres. On ne peut pas tout faire, il faut savoir discerner.

Q - Vous avez peint gratuitement des murales dans la chapelle épiscopale à l’intérieur
de la Cathédrale de St-Jérôme. Je vous avouerai que plusieurs personnes sont
étonnées, d’autres désorientées. Voulez-vous expliquer un peu cette œuvre ?

M. J. – J’ai fait des recherches. Je suis allée puiser aux sources de la grande tradition,
celle des Pères de l’Église et du Nouveau Testament. J’ai voulu exprimer la venue
en ce monde, du Christ éternel. Je l’ai représenté comme un enfant, pour
symboliser le fait qu’il a voulu franchir toutes les étapes de la vie humaine. Ce
Christ enfant est au centre du tableau entre le ciel, représenté par les anges en
adoration et la Terre, représenté par Marie et Gabriel l’archange. Un prêtre de
l’évêché, André St-André a trouvé de très beaux commentaires. Par exemple, mon
Christ enfant a les membres plus grands que ceux d’un enfant et il s’élance vers
Marie. Augustin, à propos de l’incarnation du Verbe, applique au Christ un
verset du psaume 66 : ‘’Comme un géant, il s’élance joyeux pour sa course.’’ Dans
l’épître aux Hébreux 10,9 le Christ dit : ‘’Voici, je viens ô Dieu pour faire ta
volonté.’’ Pour M. St-André mon Christ enfant exprime tout cela. Un peu plus
loin dans Hébreux 1,6 on peut lire : ‘’Lorsque Dieu introduit le premier-né dans
le monde, il dit : Que tous les anges de Dieu l’adorent.’’ C’est ce qu’exprime la
partie droite de ma murale. Sur l’autre mur, j’ai peint l’Église peuple de Dieu et
derrière l’autel j’ai peint le thème du Christ arbre de vie. Le Christ qui par sa
mort donne la vie. Aussi, j’ai voulu exprimer l’inexprimable : la vision béatifique
au terme de la vie humaine. C’est pour cette raison que la composition est plus
dénudée, plus diffuse : c’est l’inconnu. Les deux verrières qui encadrent la porte

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d’entrée à l’arrière représentent la création du monde et l’alliance entre Dieu et
l’humanité. Les petits vitraux dans les fenêtres des murs du côté droit et du côté
gauche de la chapelle représentent l’eau vivifiante, une prière, comme l’encens, vers
l’Éternel. Le vitrail suspendu au-dessus du cœur représente l’humanité, les mains
tendues dans un geste de supplication au Soleil Divin de l’Amour.

Q – Lors de sa visite ad limina, Mgr. Valois, Évêque du Diocèse à l’époque, a remis une
verrière, de votre création, au pape Jean-Paul II. Quel était le sens de ce cadeau
offert au Pape ?

M. J. - La lecture de l’entrevue de Jean-Paul II avec André Frossard a été pour moi
une révélation. (Pour moi, j’aime mieux parler de l’homme, Karol Wojtyla, que
du Pape). Ça m’a permis d’aller plus avant dans ma foi, dans ma vision de Dieu.
Ça m’a aussi permis de mettre le doigt sur le matérialisme de fait (plus subtile
peut-être que le matérialisme idéologique) qui se répand dans notre société. J’ai
compris aussi que notre monde ne s’effondrait pas, que c’était un moment de
l’histoire. Karol Wojtyla m’a redonné l’espérance. La verrière ‘’L’Arbre de Vie’’
est l’hommage d’une création artistique à quelqu’un qui avait fait quelque chose
pour moi.

Q – Monique Jarry, une dernière question : Vous ne vendez pas vos œuvres ; pour quelle
raison ?

M. J. - À l’époque, jeune artiste, je vendais mes toiles. Je croyais que c’était ce qu’il
fallait faire. Puis, soudain, je me suis surprise à refuser des offres d’achat, dans
certains cas pour des sommes importantes ! J’ai dû réfléchir, me demander ce que
ce refus de ma part signifiait profondément. Aussi, je dois vous avouer que
j’anticipais une question de cette nature de votre part. Alors, j’ai retrouvée un
petit texte que j’ai écrit dans les années soixante-dix, soixante-quinze. Il est un
peu poétique, mais résume bien dans l’essentiel ce que je pense encore aujourd’hui.
Donc, voici, je lie : ‘’Définitivement, vendre des toiles n’a aucun sens pour moi,
encore moins dans mon Œuvre. J’éditerai des livres qui les contiendront, des films
qui les logeront et j’écrirai et je chanterai. Aucune de mes toiles ne peut se situer
seule, car elles ne sont pas des œuvres d’art et je ne fais pas ‘’Œuvre d’Art’’. Elle
sont une histoire avec un déroulement, le déroulement des jours, du temps des
jours par les yeux d’un être humain dans la perception d’une femelle humaine
située dans le temps des jours.’’
Enfin, j’ai exposée mes œuvres régulièrement au courant des années. En ce

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moment, je prépare tout en douceur une exposition prévue pour l’automne 2005
ou au plus tard après les Fêtes, c’est-à-dire à l’hiver 2006. Je dis ‘’tout en
douceur’’ parce que mon état de santé ne me permet pas d’entreprendre ce projet
d’une façon plus dynamique. C’est d’ailleurs pour ces raisons de santé que j’ai dû,
à mon grand regret, cesser toute activité d’enseignement au courant de 2002.
Ceci dit, j’ajouterai qu’on me demande régulièrement de produire des affiches, des
cartes postales et des cartes de souhaits de mes œuvres. Mais comme je vous dis,
en ce moment, je n’ai pas l’énergie d’entreprendre un tel projet. Je m’applique
surtout à approfondir ma pensée, mes connaissances sur l’Art Sacré par le billet
de la prière., la réflexion et la lecture tout en exécutant quelques petits travaux
dans mon atelier ici à la maison. Mais je vous avoue que l’idée de reproduire mes
œuvres m’intéresse et que je garde la porte ouverte. Si jamais un tel projet se
matérialiserait, je n’espèrerais pas de gains importants. C’est que je trouve que
cette façon de passer mon message, mon art, est démocratique et à la portée de
tous. Je serais heureuse et satisfaite que cette démarche s’autofinance, tout
simplement, tout bonnement, ni plus ni moins.

– Merci Monique Jarry, ce fut un plaisir.

M. J. – Merci, ce fut un plaisir pour moi aussi.


***** (Post-scriptum :

Cette entrevue a été réalisée à l’automne 2004 et devait être proposée à différentes revues dans
les mois suivants. Monique étant décédée le 21 janvier 2005, l’entrevue n’était pas complète,
c’est-à-dire qu’il y avait quelques questions auxquelles Monique n’avait pas encore répondu.
Alors, j’ai dû fouiller ses textes, ses notes de cours et écouter des cassettes de cours que des élèves
avaient enregistrées pour ‘’remplir les vides’’ et m’assurer sans aucun doute (documents à l’appui)
que ces réponses sont bel et bien celles qu’elle aurait données. Donc, quelques mois ont passé depuis
et je choisis de proposer cette entrevue de nouveau. Il y a certainement des lecteurs, des artistes
qui seront sensibles à ses propos et qui oeuvrent dans le même sens. C’est aussi une invitation à tous
ceux qui sont intéressés par sa démarche à reprendre le flambeau. Merci.

Robert Stanton

***** (Fin du dossier, ‘’Entrevue avec Monique sur l’Art Sacré’’.)

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***** (Les extraits concernant l’art se terminent sur le texte précédent (Entrevue). Merci.)