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TEXTES SUR L'ART : Image numéro img134.
De la page 241 à la page 280.


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les secrets de la vie et
dont on se souvient tou-
jours quand on est
grand et que l’on

***** (Page suivante)

pense à sa grand-
mère.

Vous voilà donc le
personnage central
d’un film qui a pour
titre ‘’la conteuse de
rêve’’.

ex. : 8 Dessinez le senti-
ment que vous éprou-
vez (- Au fusain.)

* Est-ce un senti-
ment positif ou néga-
tif ?

***** (Page suivante)

* La vision que vous
donne ce sentiment
est-elle concrète ou
abstraite ?

* Quel titre peut convenir
à l’image que vous
avez faite ?

* Si le sujet vous intéresse,
vous pouvez le retravailler
en couleur.

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* Préférez-vous ce sujet
en noir et blanc ou
en couleur ?

***** (Page suivante)

3 .
* Pensez à la musique

* Quelle est la musique
que vous préférez ?

* Pourquoi préférez-vous
cette musique ?

* Imaginez que vous
êtes compositeur de
grand talent.
Vous vous mettez au
piano et la musique
que vous préférez

***** (Page suivante)

coule de vos doigts
comme une source,
sans effort et vous
jouez et vous jouez
jusqu’à ce que vous
vous sentiez dans un
rêve.
Dans votre rêve,
vous vous levez,
vous marchez lente-
ment quelques pas.

Vous êtes dans un
jardin, vous vous
assoyez à l’ombre

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***** (Page suivante)

et vous dormez un
peu.

* Dessinez les couleurs
de ce rêve.

* Titrez.

* Reprenez ce thème
au fusain

***** (Page suivante)

4 .
Vous avez un groupe
d’amis et de connais-
sances ; vous vous
rencontrez pour
parler, jouer aux
cartes, manger et
dessiner.
L’une de vos compa-
gnes semble s’inté-
grer moins bien
au groupe.
Par moment elle vous
tape sur les nerfs,

***** (Page suivante)

par moment vous
avez pitié d’elle, elle
semble toujours
prendre la vie par le
mauvais bout.

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Un jour, le professeur
de peinture est absent
et on vous demande
de le remplacer.

Vous décidez d’en
profiter pour amener
cette personne mal
adaptée à dessiner des
choses qui selon

***** (Page suivante)

vous pourraient la
libérer et faire en
sorte qu’elle se sente
mieux après s’être
défoulée dans la pein-
ture, espérant qu’après
elle pourra être une
compagne plus agréa-
ble.

ex. : Imaginer les pein-
tures que votre com-
pagne peut peindre
pour se libérer et

***** (Page suivante)

faites-les.

* Donnez des titres
(Faites au moins
une peinture en
couleur et un dessin
Au fusain)

• Après cela peignez

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la peinture de sérénité
qu’elle sera capable
d’imaginer quand
elle se sentira bien
dans sa peau et

***** (Page suivante)

sociable.

* Titrez.

***** (page suivante)

5 .
À Votre petit fils de
vingt ans qui se
cherche et se révolte,
se demande ce qu’est
l’amour vrai,
vous voulez dessiner
une image pacifian-
te

* Titrez.

* Préférez-vous la
couleur ou le
fusain ? Choisissez.

***** (Page suivante)

6 .
* Que pensez-vous
de la peinture ?

* On dit que l’image
est un langage.

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* Vous avez reçu
un contrat, on vous
demande de faire
trois grands pan-
neaux de quatre pieds
par huit pieds, pour
décorer le hall d’en-
trée d’un nouveau
centre culturel pour

***** (Page suivante)

l’âge d’or.

Vous aurez toute
l’aide dont vous
avez besoin pour
exécuter ces grands
panneaux.
vous n’avez donc
qu’à exécuter des
brouillons clairs
que vos apprentis
n’auront qu’à agran-
dir pour se faire
de grands patrons
qu’ils copieront

***** (Page suivante)

ensuite au mur.

Faites donc des lignes
et des formes nettes
et des couleurs
bien séparées les unes des autres pour
que l’on puisse faci-
lement découper
vos images en mor-

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ceaux comme un

‘’puzzle’’ pour le
recopier au mur.

Le sujet que l’on

***** (Page suivante)

vous commande est
le suivant :

‘’Tous les arts sont
des langages. Un
panneau illustre le
langage de la pein-
ture. Un autre, le
langage de la compo-
sition musicale.
Enfin le dernier qui
sera au milieu
représentera le langa-
ge
de la vie.’’

***** (Page suivante)

note : employez la goua-
che là où vous vou-
lez de la couleur
et si vous voulez,
vous pouvez tracer
le contour de vos for-
mes en foncé pour
qu’elles se décou-
pent bien pour vos
apprentis.

***** (Page suivante)

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7 .
Les architectes qui
vous ont engagés sont
très satisfaits des
trois panneaux du
centre culturel de l’âge
d’or.
Alors ils vous réen-
gagent pour un autre
contrat :
La salle de jeu
d’un nouveau jardin
d’enfants est une gran-
de pièce rectangulaire.

Comme on a confiance
en vous, on vous de-

***** (Page suivante)

mande votre idée pour
la décoration et pour
le thème à choisir
pour deux grands
panneaux à mettre
sur le mur du fond ;
les murs de côté sont
pleins de grandes
fenêtres donnant sur
un beau parc et
le mur d’en avant
donne sur le hall
d’entrée avec de cha-
que côté de la porte,
deux grands aqua-
riums.

***** (Page suivante)

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7 . A.
Petit exercice au fusain :
dessinez de l’eau,
son mouvement et
ses ombres.

7 . B.
À la gouache :
dessinez la mer
vue de sous l’eau.

***** (Page suivante)

8 .
Comment vous sentez-
vous aujourd’hui ?

Exprimez-le par un
jeu de couleurs.
Donnez un titre.

***** (Page suivante)

9 .
C’est un jour où
vous vous ennuyez.

A quoi pense-t-on
quand on s’ennuie ?
Exprimez-le par un
jeu de lignes au
fusain.

***** (Page suivante)

10 .
Les jours où l’on
se sent le plus

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heureuse, à quoi
pense-t-on ?
Et comment se sent-
on ?
Exprimez-le par
une image
audacieuse et
sans hésitation !

Titrez.

***** (Page suivante)

11 . A .

(M) pour Monique.
J’ai 33 ans.
Je m’imagine la
vie à l’image de mon
expérience et plus
de cinquante ans
pour moi, c’est
quasi inimaginable.
La vie avant il y
a cinquante ans,
c’est presque le
début du monde,
non ?
Je vous fais bien
rire, vous me

***** (Page suivante)

trouvez bien enfant.

Farce à part, pei-
gnez-moi la vie
telle qu’elle était
dans ces années

Page 251

que je n’ai pas pu
connaître et dont
je ne saurai rien
si vous ne me les
montrez pas.

11 . B.
Puis,
quand vous aviez

***** (Page suivante)

trente-trois ans, à
quoi pensiez-vous ?

* Peignez comment vous
vous sentiez.

11 . C.
Enfin,
quand vous étiez en-
fant, quelle sorte de
petite fille avez-vous
été ?

* Traduisez en image
ce qu’était votre

***** (Page suivante)

monde d’alors.


Bonnes vacances.
Gardez tout.
notez vos idées.
ramassez vos essais.
nous allons regar-
des cela ensemble

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l’automne prochain.

Je vous aime beau-
coup. Bon été X X X

Monique

----------------------------------------

***** (Bio., page : 1040) (1983)

***** (Texte dams un carnet.) (1983)

Quest. : Pourquoi croyiez
vous que votre art
se développe toujours
à l’extérieur de tous
les courants dominants
des années 60 ?

Rép. : ‘’je ne suis pas capable
de suivre les philoso-
phies des autres.
Le monde que
J’EXERCE
est le mien.’’

----------------------------------------

***** (Bio., page : 1045) (1983)

***** (Extrait d’une lettre à une amie.)

‘’…mais quand à moi, non ; maintenant, à ce stade-ci
de ma vie, je me détourne vraiment ‘’comme ça’’
de la ‘’maya-familiale-du-monde’’ pour continuer,
mais sans hésitations cette fois, sans remord et


Page 253

8

sans regrets surtout vus le sens de la vie, la méditation
et ce que l’on peut appeler ‘’mon œuvre’’.
Vois-tu, c’est qu’au fond de mon cœur, je me
suis toujours sentie comme…entièrement ‘’consacrée à’’
et que je me rends bien compte qu’il n’en va pas
de même pour tous.
Il semblerait que beaucoup subissent la vie
et organisent leur temps, leur loisirs, leurs désirs
et leur argent ‘’en attendant’’…de mourir.’’

----------------------------------------

***** (Bio., page : 1064) (1983)

***** (Extrait d’une lettre écrite à son père.)

‘’…je milite aussi pour mes idées
selon lesquelles Dieu et l’idée
de l’on se fait de Dieu, ça n’est pas
la même chose
que l’ ‘’œuvre de création’’ de Marx
et le marxisme, ça n’est pas du tout
la même chose

5

- et d’ailleurs si Marx vivait encore
aujourd’hui
il ne serait certainement
pas ‘’marxiste’’ CAR IL EST
MATÉRIALISTE (1)
(1) dans une autre lettre je te ‘’brifferai’’ sur ce mot : MATÉRIALISME, car il te manque un ‘’petit’’ quelque
chose dans ta formation pour bien saisir ce qu’est le ‘’matérialisme’’…
…mais il ne te manque vraiment pas grand-chose ; seulement quelques brèves explications verbales, car intuitivement
tu ‘’sens’’ ce que cela a de distinct d’avec le

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marxisme ; j’ai pu m’en rendre compte à maintes reprises dans nos multiples ‘’conversations’’ passées.

- Mais Marx n’est pas qu’un ‘’créateur’’
il s’engage aussi personnellement
par des conseils et des appuis dans
la politique active de son temps
Et si Marx avait été ici au moment
de ta jeunesse à toi, il aurait
CONNU PERSONNELLEMENT
Jimmy Offa et lui aurait écrit
‘’fonce, vieux, fonce’’ parce que
Marx croyait toujours que ‘’ça
valait la peine d’essayer’’ autant
dans les plus petites choses que
dans les grandes et que toute
question qui te vient à l’esprit mérite
que tu la poses à haute-voix,
même si tu te fais ‘’haïr’’ pour ça
et MÊME si tu FAIS RIRE DE TOI
pour ça.

- Mais si Marx vivait aujourd’hui
il ajouterait : SURTOUT les questions
au sujet de plus PETITES CHOSES,
IL FAUT TOUJOURS LES DIRE À

6

TRÈS HAUTES VOIX
MÊME si on a pas de réponse
MÊME si : ‘’on ne sait pas pourquoi
on pense à ça !’’

car Marx n’était pas un ‘’chef de
parti politique’’ mais un
‘’créateur’’ de la pensée, de la philosophie
et de l’ÉCONOMIE
SOCIALE.

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Et tous les ‘’créateurs’’ de tous
les domaines ‘’prennent de l’expérience
avec le temps’’, parce
qu’ils ne regardent la société et
tout leur entourage ‘’évoluer’’
par rapport au passé vers l’avenir.

Et tous les créateurs-véritables
s’occupent de leurs œuvres
et les COMPLÈTENT sans
cesse, toute leur vie en espérant
que ceux qui les suivront
en feront autant ; car ‘’les créateurs
véritables’’ SAVENT que
c’est avec des ‘’idées’’ qu’ils voient

7

sur la vie, le monde et l’univers
sur les sentiments et les actes
des humains, qu’ils écrivent
ou peignent ou composent
leurs ‘’œuvres’’.

Malheureusement comme toujours
‘’ceux qui suivent’’ sont comme
tout le monde :

- ils aiment mieux l’amour
que la personne
qu’ils aiment

- il aiment mieux ‘’leur
petite fille’’ que la jeune
femme qu’elle est en réalité

- ils aiment mieux l’idée
qu’ils se font de qui sont
ou ont été leur père et

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leur mère que ce que
sont en réalité la personne
qui porte le nom de
leur père ou de leur mère.

- ils aiment mieux leurs
‘’créateurs’’ qui ne sont que
des êtres humains faillibles
comme tout le monde
que leurs ‘’ŒUVRES’’

8

SAUF que les ‘’créateurs véritables’’
sachant que nous sommes tous
faillibles, essaient du mieux
qu’ils peuvent, en revérifiant sans
cesse et en recorrigeant leurs
positions
autant que nécessaires et aussi
longtemps qu’ils ont la chance de vivre,
SAUF : oui, les ‘’créateurs véritables’’ essaient
comme ‘’ de se diviser eux-mêmes
en deux’’ et non de diviser leur
vie. Pourquoi ? Parce qu’ils ne
mettent dans leurs ‘’œuvres’’ que
ce qui leur apparaît le plus
clairement être le meilleur d’eux-
même ; pour essayer d’arriver
à composer une œuvre ‘’ QUI
SE TIENNE’’ en gardant en
eux le plus possible, leurs
incertitudes, leurs doutes, leurs
ressentiments et leurs haines
inutiles, celles qui ne sont que
psychologique ; CAR

CAR, je le répète les ‘’créateurs véritables’’
ne sont que des

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9

‘’trous d’ culs’’ comme tout le monde,
qu’ils savent donc autant que
n’importe qui, que : de se faire
une vie émotionnel et personnel
QUI SE TIENNE VRAIMANT, sans
mensonges et sans cachette et sans
refoulements et sans petites trahisons,
ÇA, C’EST PAS DE LA TARTE…

ça n’est pas facile…et ceux
qui y arrivent, ont besoin
de beaucoup d’intelligence,
de cœur-au-ventre,
de compréhension, de résistance
et de courage et ce
n’est pas encore assez…

IL FAUT ENCORE
de la chance
et BEAUCOUP, BEAUCOUP
‘’d’adons’’ favorable !’’

----------------------------------------

***** (Bio., page : 1088) (21 novembre 1983)

***** (Extrait d’un texte.)

‘’…1. Moi l’artiste drop-out
2. j’écris un livre (culture)
3. qui est un ESSAI (théorique)
4. traitant du pouvoir, du leadership et de l’identité
5. Moi qui étais une artiste aux pompes et aux œuvres extrêmement prolifique. Je ne pouvais pas voir un seul point
qui vaille la peine d’aligner deux mots sur l’art ni dans une forme de discours ni dans une autre sauf quand je disais à la rigolade

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A. l’art existe toujours puisque j’en fais
B. l’ART n’est pas mourant puisqu’il me passionne et passionne toujours autant les plus jeunes qui nous arrivent
C. Tout porterait même à croire que contrairement aux études faites sur le sujet, l’art prolétarien existe puisque le
prolétariat est supposé être contenu dans le peuple et que moi j’existe, je fais une production esthétiquement ‘’apparemment’’
hors de mon siècle, il n’y a pas moins colonisées que moi, je me comprends avec tous les trous-de-culs de tous les pays et ils se
comprennent avec moi-même quand on ne connaît pas nos ‘’langues’’ mutuelles,
et que moi je suis le peuple où ce que je parle n’est ni une langue, ni même un dialecte, ni même un jargon parce que pour
moi le peuple, même moi je ne comprends pas le sens de ce que je dis quand je parle, ni de ce que je fais quand je vis , pas plus
en créant qu’en flânant.

Et qui admettrait n’importe quoi pourvu que ça permette de comprendre quoi que ce soit, je ne suis pas prête à conclure
à la schizophrénie.’’

----------------------------------------

***** (Bio., page : 1093) (27 novembre 1983)

***** (Extrait d’un texte.)

1

‘’…27 nov. 83

réf. annexe aux calepins noirs

Mon texte (1)
(1) qu’il soit du type essai, poétique ou théorique.
…c’est de l’art versus le texte (1)
…du groupe tel quel (par exemple) qui n’est que de la littérature (3), dans tous les sens où le mot (2) littérature est employé.
(1) il est ici bien question du concept ‘’littérature’’ en écriture versus le concept ‘’Art’’ en écriture : et qui a les mêmes
concepts ‘’art’’ exactement pris toujours dans le même sens (c.à.d. : le concept de l’art) que son produit soit
. un texte lettré
. un texte signé par ordinateur

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. un objet plastique d’art
. une production auditive, musique ou autre.
----------
28 nov. 83

(3) ‘’littérature’’ :

Réf. : Picasso dans l’œil Objectif de Malraux.
paroles, paroles, récupération tentée a posteriori alors que le ‘’corps de l’œuvre’’ est là (là tout chaud et pour l’éternité).
Ce n’est pas le corps qui s’enfuit en premier de l’ ‘’œuvre-amour’’, ce sont les sentiments – le peintre, les idées restent
toujours accessibles et jaillissantes au sein du ‘’groupe’’.’’

----------------------------------------

***** (Bio., page : 1113) (8 décembre 1983)

***** (Extrait d’un texte.)

‘’…b) Juste comme sans à-propos apparent je disais récemment songeusement après un réflexion intérieur
au sujet de la danse et de la sculpture – peinture-d’un-message, du point de vue des questions relatives à l’art et son propos
ou ‘’versus’’ comme l’art et l’objet d’art dans les arts sans ‘’objets’’ (ex. musique ou entre les deux comme la danse qui est
son objet permanent et comme la musique se ‘’dissipent’’ comme les ondes ; mais la danse est visuelle comme l’art plastique.
Et tout cela pourquoi ?
Parce que l’artiste choisit ‘’d’incarner’’ sa représentation de la nature, plutôt que de le transcender.’’

---------------------------------------

***** (Bio., page : 1182) (10 janvier 1984)

***** (Extrait d’un texte.)

‘’…Quant à moi, j’ai ‘’grandi’’ bien sûr, mais ma vision du monde n’a pas changé substantiellement ; ‘’Dieu pour seul ami’’
ou la Nature pour école ou la science

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comme passion ou l’art comme ascèse…Entre les désignations, il n’y a ‘’pas grand chicanes d’idées’’.’’

----------------------------------------

***** (Bio., page : 1237) (1984) (Ce texte va de la page 260 à 285)

***** (Lettre à une amie et collaboratrice sur un projet d’art accompli dans le cadre de l’obtention d’un certificat
en art plastique pour Marie-Claire à l’Université du Québec à Montréal. Certificat qu’elle a d’ailleurs obtenue avec
la mention ‘’A+’’. Je transcris cette lettre dans son intégralité parce que Monique ‘’s’explique’’ : Ce qu’elle a vécue,
ce qu’elle vie, sa vision du monde, sa vision de l’art. C’est un texte important considérant que c’est pendant cette période
(1983 à 1986) que Monique ressaisit l’ensemble de sa vie et élabore une nouvelle orientation : L’Art Sacré, l’Art Sacré Séculier
(L’Art Sacrée Séculier est une conception de Monique en réponse à ‘’la perte de sens’’ dans la société en général.)
Elle dira : ‘’Même à l’extérieur des croyances et de la Foi les gens doivent identifier ce qui est ‘’Sacré’’ pour eux,
ce qu’ils trouvent de la plus haute importance pour pouvoir se guider, cesser d’être désorientés, retrouver le vrai sens de la vie.’’

1

21 décembre 1984

Chère Marie-Claire

Le féminisme ?

Holly Burgess, l’amie
du Women Inter Art Center
dont je t’ai parlé, disait dans les années 70, que cette
Pensée avait été pour nous une École
qui nous avait appris que nous avions
été éduquées pour haïr notre
sœur, pour voir en elle une
rivale. Cela m’importait peu
à l’époque. De ma vie américaine, je
ramenais surtout le sentiment
profond que nous avions été,…how
do you say that…’’incitated’’

Page 261

…no, ‘’CONDITIONNED
TO ACT’’ ‘’malheureuses et solidaires’’
par le fait de la tradition familiale et ‘’environnante’’,
et non de la condition humaine comme telle,
et non de notre personnalité propre ou
d’une ‘’fatalité intérieure’’ individuelle comme
le freudisme voulait nous en convaincre.

2

Mais les ‘’liens d’amour’, dont je n’ai pu
commencer à me libérer qu’en parodiant et
caricaturant en 1980 ma propre
vie à travers la création comportant
un amoncellement de ‘’proverbes et monologues
selon la sainte aînée’’ dont le
thème central était ‘’l’amour est la dernière
chose dont j’ai besoin d’ici à la fin de
mes jours’’,
ces ‘’liens de tourments’’ qui portaient
le nom ‘’d’amour’’
charriant tout ensemble
et monstrueusement intriqués (1) la familiarité
de la violence, (2) la promiscuité
du silence et la (3) froideur du puritanisme
m’ont laissée passivement
obsédée par la crainte paralysante
d’être suspectée et le sentiment inquiétant
d’être transparente, à portée de toutes les griffes
et sans âme secrète et personnelle.

3

Je ne doute pas de mon potentiel, mais
il me semble toujours que tout au plus
mes ‘’efforts’’ me vaudront-ils la reconnaissance
du ‘’talent’’…il me semble toujours
que plus grands seront mes talents, moindre
seront mes chances d’acquérir quelque

Page 262

valeur personnelle pour qui que ce soit.
Voilà ce qu’à fait de moi le ‘’droit
d’aînesse’’ : n’ayant été que la ‘’persona’’,
de la mère, l’Image-Outil de quelqu’un
d’autre, je n’ai jamais découvert
que moi ainsi j’aurais peut-être
pu avoir des amis et ennemis ‘’personnels’’.
L’humour noir que j’inventai de pratiquer
pour parvenir à dire…j’allais
dire : ce qui n’entrait pas dans ‘’mes fonctions’’
…je n’ai été qu’une fonction…
L’humour blanc ou noir s’il m’a soulagé
de l’ ‘’obligation’, d’être malheureuse pour
être normale ne m’a jamais aidé

4

a rompre la ‘’nécessité’, de la solitude.
Je changerais la solitude de place ;
j’en changerais les motifs officiels
comme tous les groupes sociaux asservis
que j’ai pu observer au fil des ans.
Les femmes ? je ne sais pas.
Je n’ai jamais pu les observer avec
les capacités de mon intelligence, tout
comme l’impuissance que j’ai
à me voir moi-même, que je combats
vainement depuis des années.
L’humour chez moi n’était qu’une bravade qui me portait
à faire de l’ ‘’affection’’
par exemple une ‘’caractéristique de classe’’
dont la solidarité m’enjoignait
bien de me garder : ‘’l’affection ?
on n’en n’a jamais eu chez nous et ça
ne nous a jamais manqué’’ j’en faisais
une faiblesse des gens riches et désoeuvrés.
Le résultat ‘’dramatique et formel’’ de cet art
était très drôle, mais je n’en mesure
qu’aujourd’hui le pathétique…pathétique

Page 263

de ma propre vie que mes parodies me mas-

5

quaient à moi-même.
Le ‘’peuple travailleur’’ que j’ai toujours
Violemment défendu contre la besoin d’expérience
Et de manipulation des intellectuels,
ce peuple qui m’attendrissait,
dont le travail rémunéré occupait toute
la vie et les préoccupations, que je
croyais réduit au SILENCE SOCIAL ET
POLITIQUE par ‘’la nécessité’’ et au
SILENCE SPIRITUEL par l’ignorance ;
ce cher peuple aussi, je me suis trompée
du tout au tout sur le sens de sa
personnalité. SON SILENCE EST UN
CHOIX. Son absence est un repaissement.
Il n’est pas un consommateur
averti ou non, il est philosophiquement
et métaphysiquement matérialiste.

6

Je me demande comment j’ai pu tant
d’années continuer de trouver si naturel
de me consacrer aux autres sans jamais
réfléchir à l’anonymat de ce que l’on
appelle ‘’les autres’’. Je savais pourtant
que ‘’l’homme moyen’’ des statistiques
n’existe pas. Je savais pourtant et
je me ‘’dévouais’’ beaucoup pour
le faire comprendre à mes collègues
de travail de l’Internationnal data Bank
en 1972 que le ‘’Futur Trends’’
et les : si la tendance se poursuit…’’ du Club
de Rome n’avaient aucune réalité hors
des mécanismes régulateurs de la nature, et
que le ‘’mammifère humain’’ fait partie de

Page 264

l’écologie naturelle, que les building de béton
sont aussi ‘’naturels’’, que les gerbes de blé
si poétique aujourd’hui furent
des herbes du diable du ‘’Progrès’’ d’une
autre époque. Et quand Marshall McLuhan
me donna justement les ‘’mots pour le dire’’
avec sa ‘’théorie du rétroviseur’’, j’exultai de
reconnaissance.
Tu vois bien que je savais et que je pouvais
Beaucoup de choses MAIS je n’ai

7

jamais pu me sortir de la misère morale
de l’impuissance !
Le mot-clef, c’est : INVISIBILITÉ
Sentiment éprouvé jour et nuit, année après
année, quoique je fasse.
C’est d’ailleurs en vivant cette crise d’angoisse
innommable qui m’a jetée dans le
mutisme ‘’complet’’ depuis 18 mois que j’ai
commencé à m’apercevoir de quelque chose.
Je dis mutisme ‘’complet’’ car c’est la première
fois qu’il m’est arrivée de vivre, ‘’passer
des jours’’ dans le ‘’dé-sespoir’’.
Dans Toutes
Les autres attaques aiguës de mutisme
qui jalonnèrent ma vie comme les lumières
au coin des rues interrompant abruptement
toute carrière et surtout tout succès
naissant depuis ‘’que j’ai 14 ans’’ ho ! ho ! le
beau lapsus…depuis 23 ans que j’ai 14 ans !
Donc dans toutes ces dépressions
je ne fus jamais seule, ‘’gardée’’ que j’étais
par l’espérance…
Cette fois-ci ce fut l’innommable, d’espoir
je n’en avais aucun


Page 265

8

passé la panique ou plutôt tout au travers,
hors la douleur physique de la tête au pied
que j’éprouvais une peur hystérique de ‘’sentir’’,
les seules idées qui me passaient par l’esprit,
s’était un inventaire de connaissances…
…Je ne pouvais m’empêcher d’en être
surprise malgré ma frayeur et mon désarroi…
alors que plus un seul être
humain ne pouvait plus rien pour moi
parce qu’autant j’avais perdu le goût
de vivre, autant j’avais perdu tout sentiment,
intérêt et curiosité envers quiconque.
Je n’étais plus rien, l’expérience était
nouvelle ; l’inévitable de la mort et la
dissolution seul, éveillait en moi quelqu’
intérêt…avant de mourir, puisque
tel j’y consentais, la curiosité qui m’occupait
en un tel ‘’moment’’ c’était être
Seule et Libre devant l’Absolu ‘’pour voir’’ !
Pourtant le sens aigu de ma solitude
morale totale continuait d’affoler totalement
mon corps…
Mais c’est pourtant à ce moment des mille morts que j’ai

9

pris conscience de la valeur dans mon esprit,
de l’existence objective de l’intelligence
que je m’étais élaborée parallèlement
à la solitude morale de toute ma vie,
de l’indestructibilité en moi de la perception
et de l’appréciation de la Beauté. Même
si détruite et épuisée de déceptions, me
sentant abandonner la vie, je continuais
d’éprouver la Beauté du
Monde ! !
J’étais comme en état de choc,

Page 266

Je vécus des semaines dans cette étrange
contradiction, figé là, masse de
souffrance et animal de douleurs. Rien ne
se passait. J’essayais de transposer le stoïcisme
physique que je possédais depuis toujours
en stoïcisme psychologique pour qu’au moins
cessent les méfaits sur mon pouls de mes accès
incontrôlables de panique. Je craignais
surtout la défaillance cardiaque. Car
l’idée qu’en plus de n’être jamais
vraiment parvenue à ‘’participer de ma pro-

10

pre vie’’, je puisse même être spoliée
de vivre calmement ma propre mort me
révoltait contre la nature de la
réalité.
C’est à te l’écrire que je m’aperçois
qu’il se passait autant que maintenant…
un début je doutais
surtout de la réalité…je luttais
surtout pour ne pas perdre l’esprit
et dans mes ‘’temps libres’, seulement
pour ne pas perdre le corps.
C’est après ‘’un temps’’ que je commençai
à me révolter de me sentir si submergée
physiquement que je ne me
sentais même plus garantie de pouvoir
me rendre compte quand je
mourrais : ‘’que’’ j’allais mourir.
Je réalise à l’instant combien souvent
dans mon enfance j’ai eu peur que l’on
me tue ‘’par mégarde’’. Ce n’est pas que
ma mère me batte qui me dérangeait,

11

c’est le côté ‘’dangereux’’ de ces

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jeux-là. Voilà ce qui m’effrayait,
pour moi et aussi pour toi.
Je ne voyais pas de mal à ce que
les mères battent un peu leurs enfants,
c’était la ‘’mode’’, ça faisait partie des
us et coutumes ; c’était notre mode de
vie à nous. Cela prouvait que nous
étions génétiquement plus forts que les
autres classes sociales qui
sont obligées de se faire soigner pour la
moindre égratignure. J’ai toujours
éprouvé la plus grande fierté d’appartenir
au groupe le plus fort de la société et le mieux
adapté pour survivre. Voilà ce que
furent mes opinions sociales ‘’officielles’’
jusqu’à maintenant.
Je n’étais d’ailleurs pas peu fière
étant une femme, d’avoir par
ma mère eu l’occasion de me prouver
que des femmes sont aussi fortes que
les hommes. Depuis des siècles que

12

les hommes se faisaient une réputation
dans le monde en se battant
au coin des rues. Les occasions de
démontrer sa bravoure, sa force, son
courage et son endurance ne sont
pas nombreuses pour les femmes ça
nous n’avons pas le droit de nous
battre, même dans les ‘’duels francs’’
mais au moins nous deux, grâce
à nous même, nous avions pu faire
la preuve éclatante que si d’autre
sont les ‘’mauviètes’, que la
société prétend des femmes, cela
nous exclu nous deux ! C’est
tout de même un avantage, les

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autres femmes ont tant de problèmes
avec cela et ça paraît :
elles ne peuvent affirmer leur valeur
sans rejeter l’élégance vestimentaire
et ce n’est qu’un exemple
entre mille.

13

L’élégance et la délicatesse de ta féminité
ont toujours été proverbiales, tout comme
moi, même en ‘’bleus de travail’’ :
c’est une question de comportement physique,
de bodylanguage, d’assumation de soi.
Ce pendant j’ai tellement eu peur souvent
‘’d’apprendre’’ que l’une de
nous avait été tuée ‘’par accident’, au
cours d’une DÉ-MONSTRATION…
Comme tu peux voir je n’étais pas particulièrement
pré-disposée a prendre conscience des choses
aux niveaux où nous nous rencontrons
emfin…
Quand j’ai réalisé que dans la crise
que je vivais, sans que je ne comprenne
pourquoi, cet ‘’inventaire de connaissances’’
qui faisait de plus en plus défiler devant
mes yeux toutes les ‘’œuvres’, que l’humanité
avait produites et accumulées
à travers les âges, bien qu’à
l’instant je n’éprouvais ‘’que l’Absurde, l’Illusion de la Réa-

14

lité, peu à peu force
me fut, après quelques mois de
constater que le ‘’ciel ne me tombait pas
sur la tête’’.
Je m’explique :
Ce qui défilait dans ma tête parallèlement

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à la ‘’crise d’angoisse’’, continuait
toujours de défiler…
Deux catégories de connaissances
Se dessinaient. D’un côté l’évolution
Mystique de l’humain depuis
Abraham qui succombait à une
inspiration au point de passer à l’acte bien
qu’il n’ait pas eu les multiples
preuves de l’efficacité organisationnelle
des religions et idées religieuses
que nous avons à notre disposition
aujourd’hui en passant par l’épopée
des pré-Socratiques inventant l’infinie
que l’on ne voit pas pour pouvoir préciser davantage
l’indéfini que l’on voit devant chaque pas
pour arriver jusqu’à nous, les contem-

15

porains qui ‘’osons’’ préméditer et
organiser notre propre conscientisation.
D’un côté il y défilait toujours dans
ma tête des ‘’documentaires’’ sur cet
aspect de notre comportement où nous
passons à l’acte de recherche active sans garantie
de découverte. Et je nous admirai :

je trouvais que nous avions ‘’de l’estomac’’.

De l’autre côté, le défilé d’images
me montrait tous nos ‘’objets’’ d’art,
des temps les plus anciens jusqu’à
notre siècle. Dans chaque ‘’objet’’ je
voyais l’ ‘’artiste’’ (connu ou anonyme,
conscient ou inconscient de sa démarche). Mais
en plus de la ‘’parenté’’ psychologique
que je connaissais déjà entre
tous les créateurs au niveau de ‘’l’attitude
à l’objet d’intérêt’’, de la réaction

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à l’Autre, même quand cet autre
c’est soi-même, comme c’est souvent le cas dans
les siècles derniers ; en plus
de ‘’ressentir’’ dans le résultat de l’œuvre

16

accomplie, ‘’ce’’ qui les forçait
tous à passer à l’acte ; cette fois, j’étais
frappée par l’ ‘’EFFICACITÉ’’ de l’approche
proprement ‘’artistique’’ d’un point
de vue du
développement de la science et
de l’histoire des idées.

Dans l’évolution mystique de
l’espèce je voyais
l’approche ‘’du regard amoureux
sur le monde en tant qu’outil de
connaissance’’.

Dans la présence de l’art au
milieu de l’évolution de l’espèce,
je découvrais ‘’le mimétisme’’ du
‘’su’’, comme de l’ ‘’éprouvé’’, en tant
qu’outil de connaissance.

17

Ne t’étonne pas de mon cheminement
ça toujours été le mien, seulement
je n’en parlais pas…sauf
avec les gens que je ne connaissais
pas…c’est pour cela que comme
Prévert : ‘’je dis tu à tous ceux que
j’aime, même si je ne les connais
pas’’…j’espère pouvoir chanter le
reste du poème où il dit : ‘’je dis
tu à tous ceux qui s’aiment, même

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si je ne les connais pas’’…
c’était mon intention mais dans l’univers
où je me suis traînée, j’ai rarement
vu personnellement des gens qui s’aimaient…
une fois au Mexique…une camarade
et son père se regardèrent avec la tendresse
de l’amour…ça m’avait beaucoup
impressionnée…
Et tout, je viens tout juste de voir
que sans nous connaître vraiment,
nous nous étions aimées depuis
longtemps…’’ to care’’…

18

Tu vois, l’Art, ça a toujours
‘’Fonctionné dans ma vie’’ comme une
ascèse, qu’il s’agisse de la ‘’pratique’’
de la création ou qu’il s’agisse de
la ‘’pratique’’ de la méditation ou de la
réflexion sur l’Art.
Et toujours, chaque jour les ‘’documentaires’’
mystiques, je les ressentais comme
un rajeunissement ; ils me rappelaient
à moi-même ; ils me rappelaient
surtout au réel de la Réalité
et apaisaient ma panique.
Mais en fait ce n’était pas tout à
fait dans cet ordre. Je m’en aperçois
en l’écrivant. Les documentaires
mystiques ont commencé dès les
débuts, je ne pouvais les arrêter,
mais à cette étape ils ne se distinguaient
pas encore de l’Art
et ils ne m’apaisaient pas du tout.

19

Ce sont les images de l’Art qui

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ont d’abord commencées à prendre
de plus en plus de place dans les
‘’documentaires’’ de science comme
premier pas.

Puis de toutes les ‘’inventaires’’ d’images
et d’idées, la ténacité de mon sentiment
de la Beauté éblouissante du
Monde a commencé d’attirer mon attention.
N’oublie pas qu’à cette étape-là,
j’étais encore entièrement possédée par
la douleur physique, une tristesse
profonde et globale, l’angoisse devant
la perte de sens et la panique devant
la perte de la Réalité.
Je cherchais, je cherchais, sans cesse
ce que je pouvais avoir ; quelque
chose comme ça, de si aigu, in-

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tence et surtout de si total, sur tous les
fronts en même temps, ne m’était jamais
arrivé de ma vie. Disons que je n’avais pas
de documentation sur de tels…
avènements. J’étais totalement dans le
‘’cirage’’, comme je te l’ai dit la semaine
dernière, pour plusieurs semaine
je n’arrivais même pas a m’apercevoir
qu’il y avait quelque chose de
‘’psycho-‘’ dans ce ‘’somatique’’- là,
même si je vérifiais tant que je pouvais.
Jusqu’à récemment de toutes les explications
la plus plausibles demeurait que
tout était peut-être causé par mon
ignorance médicale qui m’aurait fait
‘’paranoïer’’ depuis 18 mois devant une
crise d’asthme aiguë de 36 heures environs,
causée par la poussière effectivement très

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grande dans laquelle je vivais alors depuis
une dizaine de jours (symbolisme : cette poussière
venait des travaux commencés par ceux à qui
je venais de vendre ma ‘’maison’’ et qui démolissaient

21

a l’étage en dessous de moi, juste sous ma chambre,
pour se ‘’faire’, un magasin, ce que moi j’avais
construit plus tôt, avec amour, pour me faire un
atelier…mon atelier partait en poussière, je respirais
ses cendres et j’étouffais…je crevais
(symboliquement il arrivait le ‘’pire’’, ce que j’avais
toujours craint le plus : je perdait mon atelier ‘’par
accident’’ puisque je n’aurais jamais vendu cet
atelier, première réussite-possession financière de
ma vie, n’eut été de la crise économique,
qui me força à vendre ma maison pour ne pas
‘’tout perdre’’…je pense à l’enfance et
je crois qu’en ne sauvant ‘’que’’ sa vie physique, on ne
réussit pas nécessairement à survivre à ‘’l’attentat’’…)

Ce n’est que depuis quelques jours,
avec nos conversations, que la ‘’documentation’’
que j’ai reçue du docteur Michel a confirmées,
que je sens que ce que j’ai eu n’est pas une
maladie purement physique. Et le plus drôle,
c’est que ça semble suffire à me libérer
et de la panique et du découragement. Cela
suffit aussi à restaurer ma combativité…et mon
écriture.

22

C’est pour cela d’ailleurs que je t’écris ce nouveau
‘’texte’’ : je sens que ce n’est pas le moment
pour moi de m’attarder sur le thème de la
mère, ni de la condition féminine, ni rien,
ni rien d’autre que sur tout, amour, amitié,

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affection, pensées, etc…tout ce qui me
mène à deux choses seulement…parce
que je sens que je peux enfin faire d’une
pierre deux coups qui sont essentiels pour ma
vie et ma survie…parce qu’on dirait que
ses deux choses veulent s’unir enfin
et naître ensemble.
Il s’agit de tout ce qui touche le sentiment
de Beauté et l’Art, d’une part et tout
ce qui touche ‘’la sale affaire’’ de la PERSONA
d’autre part.

Donc, dans ce ‘’bordel du désarroi’’, je
commençai à m’étonner d’avoir ‘’le cœur’’ à
me laisser émerveiller et subjuguer par
une ‘’question de détail’’ comme
la Beauté du Monde et le sentiment de Beauté.

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La Beauté que je percevais cela me semblait
‘’bon’’, d’une infinie délectation même je pensais pour
s’y abandonnerait totalement.
Mais je n’étais pas d’humeur à me ‘’jeter’’
dans le ‘’nirvana’’ à ce moment-là ; j’en aurais
d’ailleurs été incapable.
Malgré tous les ‘’médicaments’’, j’ai passé
des semaines sans pouvoir dormir plus de
4-5 à 10-12 minutes de suite : c’est Robert
qui me ‘’gardait’’ et j’y tenais beaucoup,
je ne sais pas encore pourquoi exactement.
J’étais une bête affolée.

Dans l’échelle des priorités des valeurs,
la Beauté du Monde me semblait ‘’EXTRÈMEMENT’’
secondaire, par comparaison
aux questions de ‘’vie et de mort’’, questions
auxquelles j’étais sûre d’être en train
de me confronter…et je pense d’ailleurs

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aujourd’hui que c’était probablement
vrai…
Mais je dois te dire cependant que

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j’envisage sérieusement que ces
‘’trois’’ questions ne sont peut-être
pas ÉLOIGNÉES comme je le pensais…
D’ailleurs Maslow avec sa pyramide des
besoins, tout autant que Mc Gregoir,
sont quand même restés les bras ballants
à se tortiller devant l’énigme de la
‘’motivation’’…tout ce qui vit y est
quand même ‘’motivé’’ pard-là les
questions de bien, de mal, d’habitudes,
de force, de résignation etc…
enfin le ‘’sujet’’ des amateurs mécanos
et systèmes.
Puis peu à peu, c’est la notion
de Beauté elle-même qui s’est distinguée,
de l’Art, autant que de la Science,
et la mystique.
C’est à cette phase-là que je me

25

suis aperçu que ‘’le ciel ne me tombait
pas sur la tête’’…c’est-à-dire…

À cette époque-là ce que j’appelais
ainsi était ‘’perdre conscience’’, pour mourir
vraiment ou non. Ça me semblait égal.
Les médecins auraient peut-être pu
me soigner mais ‘’l’interruption de
quelque chose’’…eut été psychologiquement
irréparable pour moi. Je le sentais
et le pensais aussi. Je sentais que
si cela arrivait…j’allais dire ‘’encore’’,

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même si on me rescapait…’’encore’’, je
choisirais de me suicider plutôt que
…? ? ? de revivre ‘’ça’’…il s’agit
probablement de mon accident
d’auto à 25 ans, qui interrompit
une psychanalyse toute nouvelle (3 mois)
qui commençait à prendre ‘’tournure’’,
dans la quel on me ‘’parlait’’ de la
vie, des gens, de la famille sous
des aspects qui ne me touchaient

26

guère.
J’ai d’ailleurs ‘’rejoint’’ ce point de
l’analyse psychologique en fin de
semaine dernière et je suis vraiment
arrivée à la conclusion non seulement
que ça ne me ‘’touche’’ pas mais,
disons-le en boutade : ‘’Il n’y a rien
à faire pour le freudisme et les freudiens
et il est trop tard ce pauvre diable de Freud
aussi !’’
Mais je sentais que j’arrivais
à me défaire de quelque chose
qui (me) laisserait le champ libre
à l’art.
Ce n’était pas très articulé à
l’époque, bien sûr, mais
je pense que comme
je voyais à quoi s’intéressent
ceux qui s’intéressent aux ‘’autres’’
et voyant que ‘’je ne manquais rien’’,
j’allais enfin m’élancer, sans regret et

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sans culpabilité,
sans arrières-pensées, enfin dans

Page 277

ma peinture. En toute simplicité,
haussant les épaules en disant de
moi-même : ‘’Bienheureusx les creux,
le Royaume est à eux’’.
Puis il y eut l’accident, la commotion
cérébrale, l’amnésie, à la-
quelle j’eus tant de mal a m’adapter,
surtout après quelle fut partie.
‘’Avoir été amnésique’’ ! ! je ne pensais
plus qu’une personne pouvait regarder
le monde en face après ça.
D’ailleurs si j’écris tellement en ce
moment plutôt que de dessiner
produire plastiquement, alors que je sens
bien que j’ai le diable au corps de
la sainte motivation qui m’est enfin
revenue, je sens bien qu’écrire en
ce moment c’est la même chose que si
je peignais. Je ne me ‘’sens’’ pas

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tellement de peindre…pour la même
raison qui fait que j’écris tant ces
jours-ci…je sculpterais plutôt,
cet autre art, la sculpture, que,
comme l’écriture : je pourrais
faire ‘’même aveugle’’…
C’est que parallèlement à l’ ‘’affaire’’
de l’amnésie, la même commotion
cérébrale avait affecté ma
vue. Mais je trouvais cela ‘’vachement’’
moins grave ! J’ai pris mes
dispositions, tout simplement.
En cas que cela ne se
replace pas suffisamment : j’ai
recommencé d’écrire ce que j’avais
abandonné à l’adolescence pour la peinture,
c’est là que j’ai recommencé a composer

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un peu de musique, repris la danse,
enfin tout ce qui peut s’équiva-

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loir au cas où on ne voit pas bien.
D’ailleurs, c’est également pour cela
que j’ai commencé à travailler avec des
verriers. Au début quand j’ai connu Robert,
il était au courrant : ma vue c’était
grandement améliorée, techniquement
mes deux yeux focussaient
avec suffisamment de ‘’fiabilité’’ pour
que je me sois risquée a apprendre à
conduire un véhicule ; mais la
concentration visuelle me causait encore
beaucoup de migraines dès qu’elle se
prolongeait un peu. De plus, ça n’était
pas encore tout à fait au point pour
les choses petites comme un ‘’trait
de plume’’, c'est-à-dire joindre une
ligne avec une autre. Je passais
encore souvent à côté.
Donc Robert et l’atelier où je commen-

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cai à travailler le verre accepta de m’aider.
Je faisais mes ‘’dessins’’ en gros, avec un
large crayon-feutre et les autres me
le rapetissaient et ‘’traçaient’’ pour moi
les gabarits de montage qui demande
beaucoup plus de précisions. En échange
je leur apportais mon collorisme, mes
lignes de composition et de mouvement.
Tout le monde y gagnait.
Je dus m’adapter à dessiner avec des
formes fermées, séparables, découpables,
comme dans le dessin de mode que

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j’avais un peu pratiqué étant plus jeune.
Tout cela est du passé, ma vue va nettement
mieux je le réalise par le fait
des dentelles de métal que je me suit
mise à produire il y a environ deux
ans…juste un peu avant que ne
se déclenche la grande ‘’crise’’ dont nous

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parlons.
Quand à l’ ‘’avantage’’
Des patrons et gabarits
dans le travail du verre, tu as vu toi-même
ce que j’en ai fait. De plus en
plus, nous coupons ‘’à l’œil’, sans
‘’dessin’’ préalable, et le ‘’montage’’ se fait
à main-levé comme dans toute sculpture
qui n’est pas ‘’coulée’’.
Et va pour les yeux et l’avènement
de l’ère multi-média dans ma vie.

Mais l’amnésie, ça, ça a été autre chose.
Tous les préjugés et craintes de mon milieu
sont allés lutter et s’effondrer là-de-dans.
Ça me fait rire parce que je sais
que ça m’a torturé des années et
des années, mais que comme de fait je
n’avais plus pensé à cela depuis une
couple d’années. Toutes les questions,
que ça m’a posées en bon, en mauvais, ça
me coule aujourd’hui quand j’y pense

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comme de l’eau sur le dos d’un canard.
Peut-être n’étais-je pas si indifférente
il y a 18 mois avant ma confrontation
…entre l’Absolu et le Relatif…

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hum ! hum !...oui ce fut cela…
je ne suis pas encore retombée entièrement
sur mes pieds, c’est-à-dire :
‘’réorganisée’’ ; mais comme de fait,
je me sais ( - lapsus je voulais écrire ‘’sens’’)
je me sais donc, claire, située…situable
en tout cas, et LIBRE totalement par
rapport à ces questions qui pour moi on
réintégrées entièrement ce que j’appelle
la Nature, et qui est mon amie et
ma protection, sauvegarde.
Moi, je ne suis peut-être pas ‘’totalement’’
réintégrée dans la Nature…mais en tout
cas, j’en connais l’adresse.

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Voilà ce que ça voulait dire pour
mois ‘’quand le ciel nous tombe sur la tête’’
…J’ai trouvé cela ‘’dur’’, même quand on en
réchappe.
D’autant plus que je n’ai jamais retrouvé
le moindre souvenir de l’accident lui-même ;
pas même le moindre
cauchemar : rien.
Les médecins ont conclu que cela
n’était probablement pas ‘’neurologiquement’’
imprimé dans ma ‘’mémoire’’
…en moi, oui…(comme une
sensation…
J’ai fini par accepter la version d’un accident
de voiture, le monde entier
ne devait pas ‘’s’être ligué’, pour me
mentir. Mais durant les 14 mois
de la phase ‘’critique’’, tant que la faculté
de récollection ne s’est pas rétablie vraiment
(c’est revenu par coup et le ‘’tout’’
en une seule journée, quelques heures),
j’ai vécu mes blessures comme si ‘’cette’’

***** (Suite : Image numéro 1976-015.)